dimanche 19 mars 2017

Les fontaines du XIXe siècle (3e partie) du Second-Empire aux fontaines Wallace

Fontaine du square d'Orléans

80, rue Taitbout, IXe arrondissement
Fontaine du square d'Orléans
La fontaine du square d'Orléans est une fontaine qui fait partie d'une cité privée. Elle se compose de deux bassins soutenus par un simple piédouche. La particularité de cette fontaine réside dans l'orientation de ses jets d'eaux : ici, l'eau monte depuis le bassin inférieur avant de redescendre et de tomber dans le bassin du sol.
La page Wikipédia date cette fontaine de 1856, ce qui correspond à l'année où le square d'Orléans a été rénové. Ce square est emblématique du quartier dit de la « Nouvelle Athènes » (je vous recommande la page Wikipédia pour une première approche avant d'organiser votre visite dans le quartier).
Selon le panneau de la Mairie de Paris, des artistes comme Frédéric Chopin, Georges Sand ou la comédienne Mademoiselle Mars y ont vécu.
Tout comme la cité Trévise, le square d'Orléans est un lieu paisible. Les immeubles et l'ensemble de la cour sont classés monuments historiques.

Fontaine Saint-Michel (ou fontaine des Amoureux)

Place Saint-Michel, VIe arrondissement
Fontaine Saint-Michel
Véritable lieu de rassemblement, la fontaine Saint-Michel est un monument phare du Quartier Latin. Conçue dans le cadre des travaux haussmanniens, la fontaine a pour objectif de masquer le mur d'un immeuble selon Jacques Barozzi dans son livre Paris de fontaine en fontaine. C'est Gabriel Davioud qui érige cette fontaine inaugurée en 1860 à la demande du baron Haussmann pour l'empereur Napoléon III.

L'auteur de Paris de fontaines en fontaine, nous apprend également que cette œuvre mesure 26 mètres de hauteur et 15 mètres de largeur. La fontaine se présente sous la forme d'un arc de triomphe. Le monument met en scène Saint-Michel terrassant le démon, soit le Bien qui l'emporte sur le Mal. La sculpture est l'œuvre de Francisque Duret, le même sculpteur de la cité Trévise. D'autres sculpteurs ont également participé à l'élaboration de cette fontaine, notamment du dragon que l'on voit au premier plan de la photo ci-dessus.
Saint-Michel est entouré de quatre colonnes corinthiennes de couleur rouge. Au-dessus des colonnes, on observe la présence de quatre statues qui représenteraient les vertus cardinales : la Prudence, la Justice, la Tempérance et la Force.
Cette fontaine est dotée de très riches éléments de décoration : des chimères, des têtes de lions, des frises et cornes d'abondance ornent le monument.

À l'époque où cette fontaine a été érigée, la critique a été mauvaise (notamment parce que la fontaine ne figure pas au centre de la place) et pourtant elle est aujourd'hui classée monument historique. La fontaine Saint-Michel est la dernière fontaine parisienne à être adossée à un mur.

Fontaine Salvador-Allende

Place Salvador-Allende, VIIe arrondissement
Fontaine du square Salvador-Allende
C'est encore à Gabriel Davioud que l'on doit cette fontaine conçue en 1865 au départ pour embellir la place de la Madeleine selon Jacques Barozzi.
La fontaine est faite entièrement de marbre blanc. Le piédouche de la fontaine est entouré de griffons sculptés. Au centre, on peut y voir une petite colonne dotée de visages féminins. Son bassin à la particularité d'être couvert de dentelures et des petits mascarons à têtes de lions sont prêts à déverser de l'eau.

Fontaine Le Génie de la Mer (ou fontaine Cail)

3, rue de Lisbonne, VIIIe arrondissement
Fontaine Cail
La fontaine Cail fait partie d'un hôtel particulier construit en 1866 par Christian Labouret pour l'industriel Jean-François Cail.
La fontaine est accessible à tous car elle se situe dans la cour de la Mairie du VIIIe arrondissement.
Adossée à un mur, la fontaine se compose d'une sculpture de Pierre-Edouard Charrier qui représente un personnage féminin assis sur un coquillage portant la coque d'un navire et entourée de deux anges. On observe également un grand mascaron à tête de triton et de petits mascarons à têtes de lion qui déversent l'eau. Ce groupe sculpté est encastré dans un cul-du-four et entouré de deux colonnes.
Mascaron à tête de triton
Le fronton met le propriétaire de l'hôtel particulier à l'honneur avec la lettre « C » de Cail entourée de deux hippocampes.
Hippocampes
Cette fontaine est richement décorée comme en témoigne la photo ci-dessous.

Serpent de mer attrapant un petit poisson
Pourquoi cette fontaine est-elle appelée Génie de la Mer? Sans doute pour rappeler l'activité maritime de l'industriel, notamment aux Antilles dans le domaine de la sucrerie.
Buste de Jean-François Cail

Au-dessus de la fontaine, on remarque la présence du buste de Jean-François Cail. Ce dernier est un entrepreneur qui excelle aussi bien dans l'industrie agricole que dans les constructions métalliques (nous sommes en pleine révolution industrielle).
Nous retrouvons les symboles du travail, du commerce, de l'industrie et de la navigation à travers la fontaine.
Détail du rinceau (frise ornementale)
On retrouve le thème de l'agriculture également dans le groupe sculpté, sous le personnage féminin.
Groupe sculpté
Le Génie de la Mer est un bel exemple de fontaine que l'on pouvait trouver dans les hôtels particuliers du Second Empire notamment à travers le style italianisant et les symboles liés à la révolution industrielle.
Cette œuvre est classée monument historique.

Fontaine du Théâtre français

Place André Malraux (ancienne place du Théâtre français), Ier arrondissement
Nymphe fluviale
En 1874, on inaugure deux fontaines pour embellir la place du Théâtre français à la demande du préfet Haussmann. Leur emplacement est lié au percement de l'avenue de l'Opéra. Le préfet Haussmann fait appel à l'architecte Davioud qui fabrique des fontaines pourvues d'un petit bassin.
Nymphe marine
Au premier abord, ces fontaines ont l'air d'être identiques. Néanmoins, les statues présentes diffèrent. La nymphe fluviale avec ses ailes sur le dos est l'œuvre de Mathurin Moreau. Tandis que l'autre qui représente une nymphe marine est signée Albert-Ernest Carrier-Belleuse. Sur le piédouche, une Ronde d'enfants est sculptée par Louis-Adolphe Eude nous dit Jacques Barozzi. Sur la colonne, on aperçoit des mascarons à têtes de loup, des visages de style antique et le symbole de Paris.
Situées dans un quartier où la règne la culture (le théâtre de la Comédie Française, le musée du Louvre et l'opéra Garnier au bout de l'avenue de l'Opéra), les deux nymphes apportent un peu de finesse et de légèreté dans le Paris imposant du style haussmannien.

Fontaine de la rue de la Grange-Batelière

16, rue de la Grange-Batelière, IXe arrondissement
Fontaine de la rue Grange Batelière
Au fond d'une cour du no16 de la rue Grange-Batelière, vous pouvez avoir la chance de croiser une petite fontaine dotée une sculpture en fonte.
Un ange assis sur un coquillage soutenu par une végétation aquatique lève le bras droit. Au centre, la tête d'un dauphin déverse (déversait?) de l'eau dans un petit bassin. Le tout posé sur un socle au motif « congélation ».
Il est difficile de dater exactement cette fontaine. Tout ce que l'on sait tient de l'inscription sous le dauphin « Fondu par JJ. DUCEL ET FILS ». Jean-Jacques Ducel fait partie de la deuxième génération d'une famille spécialisée dans la fonte d'art depuis les années 1830. On peut donc situer cette fontaine, à la fin de la carrière de Jean-Jacques Ducel soit autour des années 1860-1870 (l'entreprise ferme en 1878).
Cette fontaine sculptée est purement utilitaire, ce qui nous rapproche des fontaines Wallace.

Fontaines Wallace

Un peu partout dans Paris.
Fontaine Wallace de la place Saint-Germain-des-Prés, VIe arrondissement
Selon Wikipedia, en 2011, il y aurait pas moins de 120 fontaines Wallace dans la capitale. Il est difficile de ne pas les remarquer.
C'est un certain sir Richard Wallace (je vous conseille de lire sa page Wikipedia), un philanthrope anglais vivant à Paris qui subventionne ces fontaines. Il fait appel à Charles-Auguste Lebourg pour concevoir la sculpture à partir de ses propres dessins.

On a vu jusqu’à présent que l'implantation des fontaines avaient été initiée par les monarques et les empereurs. Pourquoi un particulier subventionne des fontaines à usage public ?
Nous sommes dans un contexte où la France vient de perdre une guerre (celle de 1870) et Paris voit ses aqueducs détruits. Il est alors dans l'air du temps, pour les plus fortunés de contribuer à la reconstruction de la capitale.
La première fontaine Wallace est construite en 1872 au boulevard de la Villette selon la documentation d'Eau de Paris. Jacques Barozzi évoque un succès immédiat auprès des Parisiens si bien que le nombre de fontaines Wallace augmente au fil des ans. Elie Frébault dans le journal L'Illustration, décrit une bousculade peu de temps qui a suivi son inauguration : « C'est un cadeau qui est vivement apprécié de toute la population de ces parages, par la température qu'on a eu à subir. Aussi, il y a eu des jours où l'on faisait queue toute la journée autour de la fameuse fontaine. » (L'Illustration no1538, 17 août 1872 p. 103 - 105).
Les fontaines Wallace présentent généralement quatre femmes qui, selon le Livret fontaines d'Eau de Paris, incarneraient des vertus : la Simplicité, la Bonté, la Sobriété et la Charité. Ces personnages féminins peuvent faire penser aux Naïades de la fontaine des Innocents. Sir Richard Wallace a souhaité donner une touche Renaissance à son œuvre.
Les quatre cariatides soulèvent un dôme de tuiles orné d'une pointe pourvue de dauphins. L'eau coule au centre de la fontaine.
Détail d'une cariatide
La base de cette fontaine est aussi décorée de dauphins, de roseaux, de tritons et de coquillages.
Selon la documentation d'Eau de Paris, l'empereur Napoléon III aurait choisi la couleur verte d'une part, en référence à la nature et d'autre part, à une harmonisation avec le reste du paysage urbain de l'époque : les colonnes Morris, les kiosques à journaux et les vespasiennes sont de couleur verte. La ville de Paris a voulu, après la chute de Napoléon III conserver cette couleur.

Détail au dauphin
L'ensemble des fontaines Wallace sont réalisées en fonte et le modèle de la fontaine de la place Saint-Germain des-Prés constitue le modèle le plus répandu de nos jours. Au départ, son concepteur avait réalisé quatre modèles différents. Il faut aussi imaginer qu'auparavant on y trouvait un gobelet pourvu d'une petite chaîne. Pour des raisons hygiéniques, le gobelet a été retiré en 1952 selon Jacques Barozzi.

Les fontaines à colonnettes

De nos jours, il existe deux fontaines dites « à colonnettes », place de Barcelone dans le XVIe arrondissement (photo ci-dessous) et place Tristan Bernard, dans XVIIe arrondissement.

Place de Barcelone, XVIe arrondissement
Ce modèle est postérieur au modèle d'origine. Les colonnettes sont plus simples à réaliser et de ce fait, plus économique. Malgré tout, ce modèle ne manque pas de charme : le socle est très travaillé et fleuri, les colonnes ioniques sont pourvues de décorations, le dôme est toujours tuilé, et des mascarons sont présents. Sans oublier la présence de dauphins!

Mascaron

Le modèle en applique


Rue Geoffroy-Saint-Hilaire, Ve arrondissement
Il n'existe qu'un seul modèle dit « en applique », situé aux bords du jardin des Plantes. Celui-ci, purement utilitaire a quand même bénéficié d'un travail raffiné et élaboré par Charles-Auguste Lebourg (on peut y voir sa signature avec l'année 1872 en y regardant de plus près).
Un fronton arrondi entoure un mascaron représentant une naïade qui déverse l'eau dans une petite vasque. Deux pilastres sont décorés d'un dauphin.
Il faut également imaginer qu'autrefois, des gobelets étaient à disposition des passants.

Les fontaines Wallace, toujours présentes aujourd'hui.

Les fontaines Wallace dont la vocation est de rendre accessible l'eau aux passants font toujours parties du paysage parisien. Ce sont d'ailleurs les seules à être potables parmi toutes les fontaines présentées sur ce thème. Ces fontaines de type Wallace ont inspiré d'autres designers de fontaines. On peut voir des fontaines Wallace colorées à Paris (photo ci-dessous).

Fontaine Wallace, modèle « bleu » Place Pierre Riboulet, XIIIe arrondissement
De plus, ce modèle s'est exporté hors Paris, dans certaines villes de province (photo ci-dessous) et à l'étranger.

Place de Béthune à Lille
C'est ici que s'achève notre balade urbaine autour des fontaines de Paris !

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